Depuis 2022, Jasmin Hufschmid est responsable de projet Climat chez Bio Suisse, la fédération faîtière des agricultrices et agriculteurs biologiques suisses. Elle s'engage pour que la durabilité dans l'agriculture soit envisagée de manière holistique, au-delà de la protection du climat. Auparavant, elle a étudié l'ingénierie environnementale à la ZHAW de Wädenswil, avec une spécialisation en agriculture biologique et horticulture.
Pourquoi t'engages-tu dans le domaine du climat et de l'agriculture biologique?
Je m'intéresse depuis longtemps à l'alimentation, à la différence près qu'auparavant, je me concentrais surtout sur les aspects liés à la santé. En prenant conscience des défis de notre époque, mon point de vue s'est élargi pour embrasser la situation dans son ensemble. À travers mon travail, j'essaie de contribuer à façonner le système agroalimentaire de demain.
Comment le thème du changement climatique est-il perçu par les personnes travaillant dans les fermes?
Pour de très nombreuses exploitations, c'est un sujet important, car elles travaillent quotidiennement avec la nature et ressentent les changements climatiques, aussi bien les aspects positifs que négatifs au niveau régional. De nombreuses fermes accordent autant d'importance à la durabilité globale, comme les cycles fermés ou la promotion de la biodiversité, qu'au climat. Chez Bio Suisse, nous veillons à toujours intégrer la question climatique dans une réflexion globale sur la durabilité.
En tant que jeune femme, comment vis-tu le fait de travailler dans un secteur encore plutôt masculin et imprégné d'autres générations?
Je suis convaincue que la diversité est un facteur essentiel pour relever avec succès des défis complexes tels que le changement climatique. L'égalité des droits est bien sûr une question importante pour moi, et j'ai à plusieurs reprises été agréablement surprise. La composition des groupes de travail et des organes dont je suis membre est généralement très mixte.
Toutefois, certaines personnes comptent beaucoup sur toi, en tant que jeune génération, pour changer la donne et résoudre des problèmes de durabilité. Dans le même temps, d'autres ne te prennent pas tout à fait au sérieux. C'est là que la communication, la prise de responsabilités commune et le passage à l'action prennent tout leur sens!
Dans son travail sur le climat, Bio Suisse intègre régulièrement l'interface entre la pratique et la recherche. Dans quelle mesure cela fonctionne-t-il déjà dans le domaine du climat en Suisse?
La collaboration entre la pratique et la recherche est aujourd'hui bien visible et soutenue par des réseaux dans de nombreux projets climatiques suisses. Au final, tout est toujours question de communication, de confiance et de proximité. La mise en lien des chercheuses et chercheurs avec les personnes issues de la pratique agricole ou du secteur alimentaire, comme c'est le cas au FiBL, est très précieuse. La nouvelle publication intitulée «Vaches et climat» illustre bien cette interaction. Les praticiennes et praticiens ont à plusieurs reprises suggéré ce sujet à Bio Suisse. Nous avons ensuite élaboré la publication en collaboration avec le FiBL, en nous appuyant sur les retours d'actrices et d'acteurs issus de la pratique, de la transformation alimentaire et du travail politique. Maintenant, tout le monde est ravi que cette publication existe.
Quel rôle jouent les réseaux pour toi?
Chez Bio Suisse, je suis seule responsable du thème Climat. C'est également le cas dans de nombreuses autres organisations ou associations. Il est donc d'autant plus important de disposer d'un réseau solide qui dépasse le cadre de l'agriculture biologique et même les frontières nationales.
On se rend ainsi régulièrement compte du nombre de personnes qui travaillent sur des thèmes similaires, se posent les mêmes questions et peuvent apprendre les uns des autres. C'est très inspirant et encourageant.
Y a-t-il un projet ou une initiative dont tu es particulièrement fière, quelque chose qui te rend optimiste?
Je me réjouis de la collaboration stratégique avec IP Suisse (Association suisse des paysannes et paysans pratiquant la production intégrée, ndlr) dans le domaine du climat. Ensemble, nous avons perfectionné un système qui nous permet désormais de rendre visibles les services climatiques fournis par les fermes. Nous ne sommes pas en concurrence dans ce domaine, mais souhaitons plutôt créer ensemble une valeur ajoutée pour nos exploitations membres.
Si tu pouvais donner des conseils aux jeunes qui souhaitent travailler dans le secteur biologique ou la protection du climat, que leur dirais-tu?
Réfléchis à tes projets et aie le courage de lâcher prise lorsque le moment est venu. Abandonne la pensée manichéenne, les solutions se trouvent souvent entre les deux extrêmes.
Collabore, développe des réseaux dans lesquels des personnes différentes apprennent les unes des autres, se soutiennent et s'entraident.
Veille à ta propre durabilité: prends le temps de faire des pauses et de replacer ton travail dans son contexte global. Reste connecté·e à toi-même, à la nature et à la terre.
Propos recueillis par Lin Bautze, FiBL
Pour en savoir plus
Publication du FiBL «Vaches et climat» (Boutique du FiBL, en allemand)
Climat (rubrique Durabilité)
Voix du climat (FiBL.org)
