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Drosophila suzukii - La drosophile du cerisier

La drosophile du cerisier Drosophila suzukii Matsumura (Diptera: Drosophilidae) a été introduite en Europe en 2008. Cette drosophile s’attaque à tous les fruits à chair tendre (baies, cerises, prunes, raisins) et à de nombreuses plantes sauvages à baies. Des conditions météorologiques sèches et chaudes ralentissent l'activité de Drosophila suzukii, alors que des conditions humides et tempérées lui sont plus favorables. Toutes les cultures sensibles doivent être surveillées dès le début de la coloration des fruits à l’aide de pièges et de contrôles des fruits. La surveillance des fruits sauvages mûrissant de manière très précoce dans la région ainsi que les échanges d’informations avec les collègues du voisinage peuvent donner à temps des indications sur le développement des populations. La suite du texte présente et décrit différentes mesures possibles.

Les essais du FiBL avec cette Drosophila ont lieu dans le cadre de la Task-Force (financée par l’OFAG) et du projet Invaprotect (financé par le système Interreg).

1. Surveillance

1.1 Surveillance du vol

Des pièges doivent être posés pour contrôler la présence éventuelle du ravageur dans les cultures sensibles (fraises, cerises, myrtilles, framboises, mûres, raisins, baies sauvages aux environs des vergers). Il faut suspendre ces pièges quand les fruits changent de couleur (types de pièges et appâts: voir plus loin sous Piégeages de masse).Les pièges seront suspendus dans des endroits ombragés dans les bords des parcelles et régulièrement contrôlés. L’appât liquide doit être changé toutes les deux semaines. Après utilisation, l’appât liquide ne doit pas être versé dans les cultures lors du contrôle des pièges. Les mâles sont facilement reconnaissables à leurs taches sombres sur les ailes, et on peut en général tabler sur un rapport mâles-femelles d’environ 1:1.

1.2 Surveillance des attaques sur les fruits

Pour déterminer si les fruits sont attaqués par des larves, prélever des échantillons de 100 fruits. Sur les fruits à peau lisse (cerises, myrtilles, raisins), il est possible, à l’aide d’une loupe, de voir les endroits où les œufs ont été pondus. Les framboises ou les fraises peuvent être mises au congélateur pendant quelques heures. Les larves sortent des fruits et peuvent être comptées. Une autre méthode simple pour identifier la présence de larves de Drosophila consiste à conserver pendant 24 heures à température ambiante des fruits qui semblent intacts puis de les plonger dans un récipient transparent (par exemple un verre) rempli d’eau du robinet additionnée d’une ou deux gouttes de savon liquide ou de détergent pour la vaisselle. Les larves peuvent être comptées sur le fond du récipient après 10 à 15 minutes. Déterminer avec sûreté l’espèce en présence n’est possible qu’en faisant éclore des insectes adultes. Pour ce faire, mettre des baies intactes à température ambiante pendant 14 jours dans un récipient muni d’une fermeture perméable à l’air (gaze, mouchoir en papier etc.). La proportion de Drosophila suzukii peut être facilement déterminée en comptant les mâles, qui sont facilement reconnaissables par les taches sombres qu’ils ont sur les ailes.

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2. Prévention

Il faut faire recours à différentes mesures, et il y a des différences d’une culture à l’autre. Le tableau qui suit donne une vue d’ensemble sur les mesures convenant à chaque culture. Le  texte après le tableau décrit les mesures de manière plus précise.Toutes les mesures désignées par +++ sont extrêmement importantes et devraient impérativement être combinées pour une bonne prévention. Un résumé de ce tableau est disponible sous forme de fiche d’information (en allemand).

Mesure Petits fruits Cerises Pruneaux Raisin Fruits pour la transformation Remarques
Conduite de la culture: climat sec dans le peuplement +++ +++ +++ +++ ++ Mesure sans effet en cas de pluies incessantes.
Récolte précoce;  intervalles courts entre deux récoltes; hygiène +++ ++ ++ ++ ++ Pas toujours possible; cela dépend de la culture et du degré de maturité; Raisin: éclaircir tôt, ne pas épandre de marc
Couverture avec des filets ++ +++ ++ - +

Les surfaces de vigne sont souvent trop grandes. L'ouverture et la fermeture fréquente des filets à causes du va-et-vient causé par les récoltes des petits fruits posent problème.

Piégeage de masse +++ + ++ ++ - Les cerises à maturité complète sont plus attractives pour les Drosophila que les pièges; donc le piégeage de masse dès le début de la maturité complète des cerises ne sert à rien. Les surfaces de vigne sont souvent trop grandes pour le piégeage de masse.
Refroidisse-
ment des fruits récoltés
++ +++ +++ + +++ Les températures froides ne sont pas forcément supportées par toutes les sortes de petits fruits.
Utilisation de kaolin - - - ++ + Taches et résidus de traitement, donc ne convient à aucune culture destinée à la consommation en frais.
Utilisation de chaux éteinte ++ + + + + Dans la vigne utiliser plutôt du kaolin. Efficacité incertaine sur fruits à noyau.
Insecticides + + + - + Seulement pour les situations d'urgence. Le kaolin fournit de meilleurs résultats dans les vignes.

2.1 Conduite de la culture: climat sec dans le peuplement

La drosophile du cerisier réagit de manière très sensible à la sécheresse. Toutes les mesures qui contribuent à un climat sec dans le peuplement ont donc un certain effet de protection préventive. On trouve parmi ces mesures une taille des arbres qui favorise une bonne aération et un ressuyage rapide; le mulch fréquent de la végétation sous la culture; la pose d’un film noir sous la culture; l’adaptation de l’intensité de l’irrigation. Dans les vignes, il faut bien effeuiller la zone des grappes.

2.2 Couverture

Couvrir les cultures avec des filets (mailles de 0,8 - 1,2 mm, utiliser des filets dont les mailles ne se déforment pas) empêche l’immigration des drosophiles, et c’est actuellement la méthode préventive la plus sûre. La couverture doit être installée dès le début de la coloration des fruits. Cette méthode rend les travaux de récolte plus fastidieux. Dans les vergers de cerisiers, c’est la couverture qui est la méthode la plus efficace, mais il a été observé que les fruits sont aussi attaqués directement à travers les filets. Les arbres doivent donc être taillés de manière à ce que les branches ne touchent pas les filets.

2.3 Avancer les récoltes

On peut aussi affaiblir les attaques de drosophile du cerisier en récoltant tôt, fréquemment et complètement. Les années où la pression infectieuse et forte, cela vaut la peine de récolter toutes les cerises en seul passage (et d’éliminer les fruits pas mûrs) parce que le deuxième passage de récolte est en général fortement attaqué et souvent non commercialisable. Dans les vergers de cerisiers avec plusieurs variétés de précocité différente, les plus précoces doivent être récoltées totalement pour qu’aucune cerise trop mûre ne serve de site de reproduction. Les passages de récolte doivent aussi être fréquents (tous les deux jours) dans les cultures de myrtilles et de framboises.

2.4 Destruction des fruits véreux / Mesures d'hygiène

Les fruits attaqués et en décomposition doivent être enlevés et détruits, la méthode la plus sûre étant la solarisation: les fruits sont mis pendant 10 à 15 jours au soleil dans un sac en plastique hermétique et transparent. Les fruits ne doivent pas être compostés avant cela. Une alternative consiste à jeter les fruits véreux dans la fosse à lisier, à les faire fermenter quelques jours dans un tonneau fermé ou à les enterrer (une profondeur de plus de 50 cm est nécessaire dans les sols légers).

2.5 Protéger les cultures suivantes

Dans les fermes qui ont plusieurs cultures différentes, les drosophiles peuvent migrer sur des fruits tardifs après la récolte des cultures qui mûrissent plus tôt. On peut contrer ce genre de migrations en faisant du piégeage de masse dans les bords des cultures touchées.

2.6 Réfrigération et transformation des fruits

Pour retarder le pourrissement des fruits récoltés dû au développement des asticots, les fruits peuvent être stockés après la récolte pendant quatre jours à 2 °C car cela tue les œufs et les larves. Les délais entre la récolte et la commercialisation doivent être aussi courts que possible même s’il n’y a pas d’interruption de la chaîne de froid. Les fruits à noyau récoltés pour la distillation devraient être mis en fermentation tout de suite après la récolte. Une acidification peut être nécessaire pour que la fermentation démarre le plus vite possible.

2.7 Mesures en viticulture

La sensibilité à la drosophile du cerisier dépend énormément du cépage (voir le tableau plus loin dans le texte) et du climat. Les cépages foncés et à peau fine avec des grappes compactes sont particulièrement sensibles à la drosophile du cerisier. On peut cependant s’attendre à de fortes invasions sur tous les cépages puisque les vignes sont les cultures les plus tardives. Les mesures préventives suivantes devraient donc être prises:

  • Régulation du rendement assez tôt avant la vendange (pas juste avant).
  • Mulcher rapidement les grappes qui sont par terre.
  • Ne pas épandre de marc dans les vignes qui ne sont pas encore totalement récoltées.
  • Ne pas vider dans les vignes le contenu des pièges à guêpes
  • Faire en sorte que le climat soit aussi sec que possible dans le peuplement (mulcher l’enherbement, bien effeuiller la zone des grappes).
  • Dans les endroits menacés: Envisager d’utiliser du kaolin (voir plus bas)

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3. Lutte

3.1 Piégeages de masse

Les piégeages de masse peuvent être faits aussi bien avec des pièges commerciaux qu’avec des pièges de fabrication maison. On utilisera des boîtes ou des bouteilles en plastique – si possible rouges ou noires – avec un couvercle qui ferme bien. Percer dans la partie supérieure des trous d’environ 5 mm de diamètre avec une aiguille chauffée ou un fer à souder. Laisser un côté de la boîte ou de la bouteille sans trous pour faciliter la vidange.

Il y a actuellement différents types de pièges disponibles dans le commerce: le DrosoTrap (Biobest / Andermatt Biocontrol), le Gasser-Becherfalle (Riga) et le piège Profatec (Profatec). Tous les types de pièges ont des avantages et inconvénients (état des informations: 2016):

  DrosoTrap Pièges-gobelets (Becherfalle) Profatec  
Disponible chez www.biocontrol.ch www.becherfalle.ch www.profatec.ch  
Avantages

-réutilisable
- le rouge est attractif pour la drosophile

- changement pratique et rapide
- prix avantageux
- Réutilisable plusieurs fois
- Manipulation facile
- Prix avantageux
- Couleur rouge attractive pour  D. suzukii
 
 
Désavantages - Gros pièges lourds
- Prix élevé
- Manipulation difficile
- Utilisable une seule fois
- Beaucoup de déchets
- On doit mélanger soi-même l’appât  
Prix 6.80 CHF/ pce (achat unique; dès 30 pièges) + coût des appâts (tous les 14 jours) 2.50 CHF pour le fil de fixation et la protection contre la pluie (achat unique) + 0.85 CHF par piège avec appât (tous les 14 jours) Fr. 0.90 la pièce (Investissement unique, dès 400 pièces)
+ Coûts des appâts (env. Fr. 0.20 par piège, tous les 14 jours)
 

Différents appâts sont disponibles dans le commerce: l’appât pour les pièges Becherfalle, qui est déjà déposé dan ces pièges à usage unique, et le Dros’attract qui est vendu pour les pièges DrosoTrap. On peut aussi fabriquer soi-même son appât:

  • 50 % d’eau
  • 40 % de vinaigre de pomme
  • 10 % de vin rouge
  • 0.05 % d'acétone (en option, si disponible)
  • 2 gouttes de savon ou de détergent pour la vaisselle sans odeur

Dans les essais en laboratoire, l’efficacité des deux appâts commerciaux et du mélange maison était comparable.

Il faut poser un piège tous les 2 à 5 mètres dès le début de la coloration des fruits: poser les pièges d’abord dans les bords des parcelles pour retarder l’immigration des drosophiles dans les cultures. Dès que les drosophiles ont atteint le centre de la parcelle, les pièges doivent être disposés dans toute la culture selon un quadrillage de 5 mètres de côté.

3.2 Chaux et kaolin

Diverses sources d’information signalent que les traitements faits avec des substances pulvérulentes comme des produits à base de chaux ou le kaolin peuvent diminuer les attaques de la drosophile du cerisier. Le kaolin a montré une très bonne efficacité dans la vigne et son utilisation contre la drosophile du cerisier est donc autorisée de manière régulière dans la vigne à partir de 2017 (voir plus sous Insecticides). Le kaolin provoque cependant des taches blanches bien visibles sur les fruits. Dans le cas des parcelles de vigne proches d’habitations et/ou de chemins pédestres, il vaut la peine de poser des panneaux explicatifs parce que les vignes blanches en automne provoquent sinon une avalanche de questions. L’utilisation de kaolin devrait recourir exclusivement au produit Surround de la société Stähler car ce kaolin est particulièrement pur et facile à appliquer. Les résidus de kaolin n’ont eu aucune influence sur la vinification dans les essais qui ont été faits, et ils sont aussi inoffensifs pour la santé. Vu que le kaolin n’a aucune influence sur le pH, il est plus indiqué dans la vigne que les produits à base de chaux.

Des informations détaillées sur l’utilisation du kaolin en viticulture sont résumées dans la
Fiche technique «Le kaolin contre la drosophile du cerisier en viticulture» (Boutique du FiBL)

Les résultats d’essais avec le kaolin sur les fruits à noyau (cerises à kirsch) sont aussi satisafisants, et le kaolin n’est donc permis en 2020 sur fruits à noyau (fruits à distiller) que sur autorisation exceptionnelle.

La chaux éteinte (produit: Nekagard 2, Kalkfabrik Netstal AG) est aussi permise par autorisation exceptionnelle pour l’utilisation en 2020 sur baies, fruits à noyau et vigne. Pour obtenir une bonne efficacité, l’utilisation de la chaux éteinte doit respecter quelques points qui sont résumés dans une fiche technique d’Agroscope.

3.3 Traitements insecticides

L’OFAG avait octroyé ces dernières années des autorisations spéciales pour l’application de divers insecticides pour lutter contre Drosophila suzukii dans les baies, les fruits à noyaux et la vigne.. Aussi en 2020, ces utilisations ont été enregistrées dans la Corrigenda de la Liste des intrants.

Corrigenda de la liste des intrants (Site internet du FiBL)

Le Spinosad bénéficie d’une autorisation régulière pour les baies depuis 2016. Le Spinosad n’a pas été inclus dans la liste des intrants pour la vigne, car le kaolin est en viticulture à la fois plus efficace et plus respectueux de l’environnement que le Spinosad. L’éventuelle autorisation du Spinosad sur raisin de table sera décidée en été quand il sera possible d’évaluer comment les populations vont évoluer en 2019.

Pour leur application conforme aux autorisations spéciales, les nombreuses conditions de l’OFAG doivent être scrupuleusement observées:
Produits phytosanitaires homologués (site internet de l’OFAG)

Les points suivants sont particulièrement importants:

  1. Dans les fruits à noyau, l’application n’est autorisée qu’en cas d'apparition confirmée de Drosophila suzukii, et dans la vigne seulement en cas de ponte avérée dans les fruits à partir du stade  BBCH 83.
  2. L’OFAG prescrit l’alternance de diverses matières actives dans le but d’éviter les résistances.
  3. Comme les insecticides sont utilisés près de la récolte, la question des résidus prend une grande importance. Les producteurs veilleront à ce que les quantités maximales autorisées ne soient pas dépassées pour le Spinosad (se tenir aux quantités autorisées et aux délais de traitements; voir tableau ci –dessous).
  4. L’OFAG avertit qu'il n'y a que très peu de données disponibles sur l’efficacité des insecticides et que, par conséquence, aucune garantie d’efficacité ne peut être donnée. Selon les essais italiens de l’année dernière, on sait que les traitements dans les cultures de cerises sous filet ont eu une efficacité partielle, tandis que les traitements même intensifs sur des cerises et des baies non couvertes n’ont donné aucun résultat (dégâts = 100%).
  5. Le Spinosad est toxique pour les abeilles et ne doit pas être utilisé sur des plantes en fleur ou qui exsudent du miellat ou sur des fruits endommagés avec des écoulements de jus.
  6. Début des traitements avec des insecticides (Spinosad) dans les fruits à noyau et la vigne à partir du stade 83 BBCH, dans les petits fruits à partir du stade 85 BBCH. Le kaolin et la chaux éteinte peuvent être utilisés un peu plus tôt: Début des traitements dans les fruits à noyau à partir du stade 81 BBCH, dans la vigne à partir du stade 83 BBCH, chaux éteinte sur petits fruits à partir du stade 83.
  7. Pour les mûres, la dose d'application indiqué se réfère au stade "premières fleurs à environ 50% des fleurs ouvertes" et à un taux de brassage de référence de 1000 l/ha.
  8. Ne pas appliquer sur des fruits qui sécrètent du jus de fruit en raison de dommages.
  9. Sur fraises, deux traitements au maximum par culture et par an. Pour les fraises remontantes : intervalle de traitement de 21 jours.
Produit (2020) Dosage Délai d'attente (jours) Nombre d'applications par parcelle et par année au maximum
Spinosad
(Audienz, Spintor, autres)
Baies: 0.02%1
Fruits à noyau: 0.02%2

Baies: 3
Fruits à noyau : 7
 

Baies, fruits à noyau: maximum 2
Kaolin
(Surround)

Vigne: 2%1
Fruits à noyau : 0.18-0.2 %

Pas de délai d'attente. Vigne: Dès le stade 81 BBCH. Fruits à noyau: dès le stade 81 -
Chaux éteinte (Nekagard 2) Petits fruits: 0.18-0.2%2
Fruits à noyau: 0.18-0.2%2
Fruits à noyau à distiller: 0.2-0.5%2
Vigne: 0.17-0.42%2
Baies : 2 jours,
Vigne: 7 jours
 
-

1 Autorisation régulière
2 Autorisation d’urgence

La seule utilisation d’insecticides ne suffira pas pour maîtriser ce ravageur. Les insecticides causent des problèmes parce que la ponte des drosophiles n’intervient que peu de temps avant la récolte et qu’il faut compter sur une immigration continue de nouvelles drosophiles dans les vergers. Des traitements seront nécessaires pendant la récolte parce qu’elle dure longtemps pour la plupart des petits fruits, et cela provoquera très probablement des résidus dans les fruits récoltés.

Il est donc nécessaire d’épuiser à fond toutes les mesures préventives. Dans les vergers de cerisiers, une couverture avec des filets est plus efficace et plus durable qu’un traitement insecticide. Dans la vigne, les traitements au kaolin (Surround) sont plus efficaces que les traitements insecticides. Et dans les petits fruits, des mesures d’hygiène au champ combinées avec une conduite adéquate des cultures et éventuellement des piégeages massifs sont incontournables. Une pulvérisation d’insecticide ne devrait être envisagée que si une pullulation survient malgré toutes ces mesures.

3.4 Combiner des insecticides et des pièges

L’utilisation combinée d’insecticides et de pièges à appâts (procédé Combi-Protec) suscite une discussion controversée. D’un côté la diminution de la quantité d’insecticide utilisée peut faire diminuer les résidus d’insecticide dans les fruits récoltés. Il n’est pas encore vraiment sûr que la diminution de la quantité d’insecticide diminue aussi les effets secondaires indésirables sur les auxiliaires et les abeilles parce qu’il est possible que les appâts des pièges soient aussi volontiers consommés par d’autres espèces d’insectes. Il y a en outre le risque que la diminution des quantités d’insecticide accélère le développement de résistances par Drosophila suzukii. Et il n’y a pas encore d’informations péremptoires sur l’efficacité de ce procédé. L’état actuel des connaissances ne permet pas de recommander ce procédé.

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4. Identification

Contrairement aux drosophiles européennes de souche (surtout Drosophila melanogaster), qui ne pondent leurs œufs que dans des fruits trop mûrs et même pourrissants, les femelles de la drosophile du cerisier possèdent un ovipositeur qui est une tarière assez puissante pour pénétrer dans les fruits sains qui sont encore sur l’arbre pour y déposer les œufs. La robuste tarière de ponte des femelles et les taches foncées sur les ailes des mâles sont les principales caractéristiques qui différencient Drosophila suzukii des espèces indigènes de drosophiles.

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5. Biologie

Chez la drosophile du cerisier, c’est les femelles adultes fécondées qui hivernent dans des cachettes protégées sous des feuilles ou des pierres. Bien qu’elles soient assez vite tuées par le gel, il faut penser qu’elles trouvent suffisamment de lieux d’hivernage hors gel. Ces moucheronnettes se réveillent dès que les températures dépassent 10 °C. Vu que la drosophile du cerisier préfère pondre dans des fruits mûrissants, les mouches ne migrent en général dans les cultures que quand les fruits commencent à changer de couleur.

Une femelle peut pondre entre 300 et 600 œufs, plusieurs par fruit si la pression d’infection est forte. La ponte des œufs et les morsures des larves sont en plus des portes d’entrée pour les maladies. La ponte provoque des cicatrices sur les cerises. Les petites larves blanches sortent des œufs après 1 à 3 jours, puis elles se nourrissent de la chair des fruits pendant 5 à 7 jours en passant par 3 stades larvaires. L’essentiel des dégâts est provoqué par ces larves: les fruits se recroquevillent et se transforment en bouillie. Les larves se nymphosent sur les fruits endommagés mais rarement dans la litière du sol. La nouvelle génération éclot ensuite après une diapause nymphale de 4 à 15 jours.

La température optimale pour la multiplication de cet insecte se situe entre 20 et 25 °C. Le cycle de génération étant de seulement 10 jours dans ces conditions, jusqu’à 15 générations sont possibles par année. Vu que les drosophiles adultes peuvent vivre pendant 2 mois, plusieurs générations apparaissent en parallèle, ce qui explique l’énorme pression infectieuse qui se développe à la fin de l’été et en automne.

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6. Dissémination en Europe

La drosophile du cerisier fait partie de la famille des drosophiles (Drosophilidae). Originaire du sud-est de l’Asie, elle a été identifiée pour la première fois en Europe – en Espagne – en automne 2008, et en été 2011 pour la première fois en Suisse – au Tessin, en Valais et aux Grisons. Elle a été vue en 2009 dans le nord de l’Italie (Dans le Trentino), où elle a provoqué des pertes de récoltes de 30 à 40 % dès 2010. En 2010 elle a été identifiée en plus dans le sud de la France, en Slovénie et en Croatie. En 2011 elle a provoqué des pertes totales de baies en Italie et de cerises en Espagne et dans le sud de la France. Cette drosophile a été identifiée fin 2011 jusque dans le nord de la France, en Suisse et en Allemagne. Elle envahit aussi souvent les régions élevées jusqu’à une altitude de 1550 mètres. La drosophile du cerisier s’est aussi introduite en Amérique du Nord en 2008, et elle s’y développe de manière tout aussi dramatique.

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7. Plantes-hôtes

La drosophile du cerisier peut attaquer la plupart des espèces de fruits à chair tendre  et de nombreux fruits sauvages. Les cerises et le sureau semblent être leurs plantes-hôtes préférées. Si la peau du fruit est endommagée, la drosophile du cerisier peut aussi attaquer les pommes, les poires et les tomates. Le tableau ci-après résume le potentiel de nuisance pour les principales cultures qui peuvent être concernées.

7.1 Potentiel de nuisance de Drosophila suzukii dans différentes cultures

+            jusqu’ici aucune attaque annoncée
++         peu sensible
+++      sensible
++++   très sensible

Culture / Plante Sensibilité Remarque
Fraises - pleine terre +  
Fraises - remontantes jusqu'à ++++  
Cerises ++++  
Griottes ++++  
Prunes ++ jusqu'à ++++ selon les variétés
Pêches ++ selon les variétés
Mirabelles ++ selon les variétés
Abricots ++ jusqu'à +++ selon les variétés
Framboises d'été +++  
Framboises d'automne ++++  
Mûres ++++  
Raisinets (rouges, blancs) ++ jusqu'à +++  
Cassis ++ jusqu'à +++  
Groseilles +  
Minikiwis +++ jusqu'à ++++  
Raisin de table ou de vinification ++ jusqu'à ++++ selon les variétés, voir le tableau suivant
Prunier-dattier (Diospyros lotus) +  
Kakis +  
Canneberges +  
Aronia ++ jusqu'à ++++  
Camerise (Lonicera kamtschatika) ++  
Figues ++ jusqu'à +++  
Asimines (Asmina triloba) ++++  

Les vignes peuvent être attaquées selon les conditions météorologiques et la sensibilité des cépages, mais ne représentent pas des hôtes privilégiés en comparaison à d'autres cultures. Le tableau suivant fournit une vue d’ensemble assez grossière. Les annonces d’attaques et de sensibilité sont en effet très variables pour certains cépages. On peut cependant dire d’une manière générale que les cépages précoces, foncés et à peau fine avec des grappes compactes cultivés sur des sites ombragés humides et à proximité de lisières de forêts, de haies et de vergers de fruits à noyau sont sensibles.

Cépage (rouge) Sensibilité Remarques
Mara ++++  
Regent ++++  
Garanoir ++++  
Dornfelder ++++  
Acolon ++++  
Dunkelfelder ++++  
Dakapo ++++  
Cabernet Dorsa ++++  
Muscat bleu ++++  
Gamay +++ à ++++  
Cabernet Jura ++ à ++++ Dépend du clone
Marechal Foch +++  
Malbec +++  
Gamaret + à +++  
Pinot Noir ++ à +++  
Syrah ++  
Diolinoir ++  
Merlot ++  
Galotta ++  
Humagne ++  
Carminoir +  
Ancelotta +  
Mondeuse +  
Cépage (blanc) Sensibilité Remarques
Chasselas violet +++  
Muscat +++  
Gewürztraminer ++  
Pinot gris ++  
Riesling Sylvaner ++  
Doral ++  
Charmont ++  
Sauvignon blanc ++  
Pinot blanc ++  
Chardonnay ++  
Viognier +  
Chenin +  
Sylvaner +  
Sauvignon gris +  
Auxerrois +  
Altesse +  
Solaris +  
Paien +  

 

En plus des plantes cultivées, la drosophile du cerisier attaque aussi de nombres espèces de fruits sauvages et de buissons ornementaux. Les plantes sauvages qui permettent un bon développement de ses larves représentent une source importante pour le développement de grandes populations de cette drosophile.

7.2 Aptitude de différentes espèces de fruits sauvages et de plantes ornementales pour le développement des larves de drosophile du cerisier:

+             développement larvaire impossible
++          développement larvaire presque impossible
+++       développement larvaire possible
++++    bon développement larvaire
+++++ très bon développement larvaire

Plante Développement larvaire
Aubépine (Crataegus sp.) +
Cynorrhodon (Rosa sp.) +
Sorbe (Sorbus aucuparia) +
Houx (Ilex aquifolium) +
Vigne vierge (Parthenocissus quinquefolia) +
Épine-vinette (Berberis vulgaris) +
Callicarpe de Bodinier (Callicarpa bodinieri) +
Fusain d'Europe (Euonymus europaeus) +
Troène (Ligustrum sp.) +
Pyracanthas (Pyracantha coccinea) +
Symphorine de Chenault (Symphoricarpus chenaulti) +
Viorne cottonneuse (Viburnum lanata) +
Viorne obier (Viburnum opulus) +
Pommiers d'ornement (Malus sp.) +
Bryone dioïque (Brionia diocia) +
Muguet (Convalaria majalis) +
Parisette à quatre feuilles (Paris quadrifolia) +
Fraisier des Indes (Potentilla indica) +
Lierre commun (Hedera helix) + jusqu'à ++
Prunier-cerise (Prunus cerasifera) + jusqu'à ++
Aronia (Aronia melanocarpa) ++
Merisier (Prunus avium) ++
Epine noire (Prunus spinosa) ++
cotonéasters (Cotoneaster sp.) ++
Laurier-cerise (Prunus laurocerasusu) ++
Morelle noire (Solanum nigrum ++
Symphorine (Symphoricarpus albus) +++
Gui (Viscum album) +++
Argousier (Hippophae rhamnoides) +++ jusqu'à ++++
Cornouiller mâle (Cornus mas) ++++
Chèvrefeuille arbustif (Lonicera nitida) ++++
Cornouiller sanguin (Cornus sanguineum) ++++
Cerisier tardif (Prunus serotina) +++++
Mûre sauvage, ronce (Rubus fructicosus) +++++
Framboisiers (Rubus ideaus) +++++
Ronce bleue (Rubus caesius) +++++
Sureau rouge (Sambucus racemosa) +++++
Sureau noir (Sambucus nigra) +++++
Mahonia à feuilles de houx (Mahonia aquifolium) +++++
If commun (Taxus baccata) +++++
Raisin d'Amérique, Teinturier (Phytolacca americana) +++++

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8. Recherche

Il y a déjà énormément de connaissances fondamentales sur les drosophiles en général parce que de nombreux groupes de recherche travaillent avec différentes espèces de drosophiles utilisées comme organismes modèles. Des programmes de recherche sont en cours dans la plupart des pays d’Europe ainsi qu’en Amérique pour identifier les possibilités de maîtriser Drosophila suzukii. Ces programmes sont essentiellement focalisés sur les points suivants:

  • la surveillance, les prévisions et les seuils de tolérance;
  • la capacité de propagation des insectes et leur influence sur le paysage;
  • le comportement des insectes dans le choix des plantes-hôtes et la possibilité de mettre des plantes-pièges autour des cultures;
  • l’hivernage et la tolérance au froid des drosophiles du cerisier;
  • leurs antagonistes, agents pathogènes ou parasitoïdes;
  • les substances odoriférantes comme les phéromones, les répulsifs et les attractants;
  • l’optimalisation des piégeages massifs (types de pièges, positionnement);
  • la clarification des questions en suspens au sujet du recours aux insecticides (choix des matières actives, moment des traitements, délais d’attente, résidus);
  • l’efficacité des filets comme procédé d'exclusion;
  • l’influence des mesures techniques (arrosage, taille etc.) sur la dynamique des populations dans les cultures;
  • la possibilité de faire des traitements après récolte (réfrigération) pour tuer les œufs et les larves.

On peut donc s’attendre à une progression rapide des connaissances, et les recommandations pour la protection des cultures devront être adaptées en permanence à l’état actuel des connaissances. On peut recommander les pages internet suivantes:

9. Pour en savoir plus

Drosophila suzukii (site internet d'Agroscope)

 

Auteure: Claudia Daniel, FiBL

 

Dernière mise à jour de cette page: 18.04.2020

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