«Les variétés hybrides sont interdites pour les espèces suivantes: colza (sauf colza HOLL)», précise l'article 2.2.7. du cahier des charges de Bio Suisse. Rien ne change pour l'instant, selon la décision de la Commission de labellisation agricole (CLA) de l'organisation faîtière.
Motion du Groupe spécialisé Grandes cultures rejetée
Une décision a dû être rendue car le Groupe spécialisé Grandes cultures avait déposé une motion visant à autoriser les variétés hybrides aussi pour le colza non HOLL. Celle-ci a été rejetée, comme le confirme Thomas Wiedmer, président de la CLA. Aucun recours ni transfert devant l'AD ne sont possibles.
La motion avait été déposée parce que la culture de colza bio reste anecdotique, avec une surface d'environ 420 hectares, bien que l'huile en qualité bio soit recherchée. Le choix variétal est très limité car le marché est trop petit en Suisse pour y réaliser sa propre sélection, à l'image par exemple des céréales, où elle s'opère avec succès. Cela place notamment les régions qui ont besoin de variétés précoces face à de grandes difficultés. En outre, les variétés hybrides sont autorisées en agriculture biologique dans les pays voisins, ce qui restreint davantage l'éventail des variétés bio utilisables en Suisse.
Un projet pour dynamiser la culture de colza
Afin de dynamiser la culture de colza, un projet sur les variétés de colza nommé COLORS a été réalisé ces trois dernières années sur divers sites. Agroscope, le FiBL, Bio Suisse, Swiss Granum, Biofarm, fenaco, Florin AG, la Fondation rurale interjurassienne (FRIj) et le Strickhof y ont participé.
L'objectif du projet était d'actualiser la liste des variétés recommandées avec des variétés de colza présentant une tolérance aux ravageurs particulièrement bonne, en se concentrant sur la grosse altise (ou altise d'hiver), le charançon de la tige et le méligèthe du colza.
Les variétés hybrides meilleures dans l'essai
Les résultats ont montré que les variétés hybrides pour le colza classique, Picasso, Feliciano et DK Exlibris ont été testées, étaient meilleures que les variétés lignées et les variétés hybrides HOLL dans l'essai. Leur avantage s'est notamment révélé lors de fortes pressions des ravageurs. HOLL signfie High Oleic, Low Lineolic (= forte teneur en acide oléique et faible teneur en acide linolénique). Cette propriété permet d'assurer que l'huile puisse être chauffée à des températures élevées sans perte de qualité.
Fait intéressant, les variétés HOLL sont autorisées en production biologique bien qu'elles proviennent de sélection hybride. Selon Thomas Wiedmer, une exception a été consentie, car aucune variété alternative n'est disponible et Bio Suisse souhaite permettre l'accès au marché aux productrices et producteurs.
«Les variétés hybrides contribuent à la perte d'agrobiodiversité»
Interrogé sur les raisons du refus de la demande, Thomas Wiedmer explique qu'il existe des variétés reproductibles comme alternative. Les variétés dites reproductibles sont celles dont la récolte peut être directement réutilisée comme semence. Cela n'est pas le cas avec les variétés hybrides car l'effet d'hétérosis est perdu lors d'un ressemis et avec lui une grande partie des qualités intrinsèques.
Selon le président de la CLA, les variétés hybrides menacent de réduire la diversité variétale. «Elles contribuent ainsi à la perte d'agrobiodiversité», selon lui. Avec l'interdiction des variétés hybrides, la CLA souhaiterait demeurer le plus possible indépendante des grandes entreprises de semences et de sélection, qui ne répondent pas aux principes de l'agriculture biologique ou qui ne sont pas adaptées à leurs conditions.
Espoir suscité par la règlementation bio de l'UE
Par ailleurs, la CLA espère que la règlementation bio de l'UE mènera à une amélioration de la situation sur le plan des variétés. Celle-ci prévoit que seules des variétés bio soient autorisées en production biologique dès 2037.
Adrian Krebs, FiBL
Pour en savoir plus
Colza Bio (Rubrik Pflanzenbau)
Projet COLORS (fibl.org)
Article de la Revue UFA (ufarevue.ch)